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La poésie slam de Sylvainkimouss
La poésie slam de Sylvainkimouss
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2 novembre 2005

Baston poétique, suite...

Quand deux bandes de hooligans se bastonnent, ça donne ce qui va suivre... En John King dans le texte. Issu de son premier livre "Football Factory".

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"On tourne encore à un coin, et tout à d'un coup les voilà. Millwall, droit devant. Ils doivent être 500, facile, ils ont l'avantage du nombre, ces connards, et on risque la branlée. Mais il y a pas mal de mômes dans le tas, même s'il y a aussi quelques nègres, parce qu'ils en trimbalent tout le temps avec eux. Ils sont regroupés sur le terrain vague que le conseil municipal doit qualifier de jardin public, coincé entre deux immeubles de béton, et ils commencent à avancer lentement vers nous. Ils débarquent peut-être du New Den, leur stade, ou alors ils nous attendaient là, hors de vue, ils attendaient le bon moment. Le tems s'arrête, le temps ne veut plus rien dire, on se met à hurler l'hymne de Chelsea, tandis que les briques commencent à pleuvoir, et les bouteilles aussi, lancées par des gamins depuis des balcons des appartements, au-dessus de nous.

Millwall accélère l'allure à présent, ils se mettent en marche et on sent leur haine qui vient vers nous, comme s'ils étouffaient, quelque chose comme ça, ils sont complètement remontés, et tu peux comprendre ces mecs-là en même temps, coincés dans leur taudis pourri, mais on est forts, à nous tous, et nous, c'est Chelsea, et c'est ce qu'on voulait, marquer quelques points à nous, leur montrer ce qu'on a dans le bide, leur faire savoir qu'on est tous là, et du coup, on ne sent plus la haine de Millwall, parce que la notre suffit. *

On leur rebalance les briques, et on fonce, dans un rugissement qui nous fait péter tous les boulons, on se rue sur eux, nos oreilles bourdonnent, c'est la guerre, au coude à coude, la guerre pour notre dignité, pour celle de nos potes, les premiers pains, les premiers coups de latte, les deux bandes se jetant l'une sur l'autre. On est bien là, présent, dans ce bidonville qu'on appelle Peckam, New Cross, Depford, quoi que nous soyons, d'où que nous venions, et les coups de pied et de poing volent, pire que dans un asile devenu fou, puis des brèches apparaissent, comme toujours, entre les deux bandes, un fracas de verre brisé, deux mecs qui tombent sur le bitume, et on leur saute dessus, ils se font instantanément rouer de coups, il y a un pauvre con qui se réveillera avec un méchant mal de tête, demain matin.

Pas le temps d'avoir peur, il ya là six ou sept mecs plus âgés qui s'amènent de derrière la foule, des gars qui ont passé la quarantaine, de vrais bagarreurs, ceux-là, avec leurs vestes d'ouvriers, leur gueule couturée, leur peau vérolée, les cheveux coupés n'importe comment, et des yeux de mort, on voit leurs yeux de mort même dans la pénombre de la rue, mais ils  se prennent des briques dans la tronche, se font démolir comme les copains.

....[...]... les bastons se déclenchent derrière, devant, un jardin d'enfants maintenant, et les bouteilles se fracassent sur le portique. Un jour on rigolera en y repensant, en revoyant les balançoires qui se baladent dans tous les sens, et ce pauvre môme qui essaie de s'échapper par le toboggan, et ce nesse de se faire rattraper par deux gars plus âgés qui lui cognent la tête sur le montant, des gars de Chelsea, ils veulent absolument laisser une trace dans le métal, une trace avec les dents du môme. C'est dingue de bastonner dans un jardin d'enfants, et ça promet d'être sérieusement marrant quand on y repensera plus tard, quand on évoquera notre virée à Millwall. L'enfance baisée par des gens adultes qui devraient être un peu plus futés."

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John King a du vivre ces moments où il a eu des potes berçant dans ce genre de délire. Toujours est-il que son écriture sonne vrai. Je reviendrais là-dessus dans ma prochaine note. Enfin un écrivain dans le vrai, halleluia, j'en deviendrai presque chrétien.

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"Headhunters" de Chelsea. Pas des poètes, les gars....

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